Lorsqu’un travailleur est en situation de danger immédiat et grave, il est en droit de faire valoir son droit de retrait.
- Dans quelles conditions le droit de retrait est payé ou pas ?
- Quelle procédure faut-il suivre et quelles sont les conséquences d’un exercice du droit de retrait ?
Les détails point par point dans ce guide.
Quel est le rôle du CSE dans le cadre des droits d’alerte et de retrait ?
Le Comité social et économique joue un rôle important dans le domaine de la santé, de la sécurité, et des conditions de travail.
CSE et droit de retrait : plusieurs rôles auprès du salarié
En cas d’exercice du droit de retrait par un salarié, il peut être impliqué soit à titre consultatif (analyse du risque et recherche de solutions), soit à titre d’intermédiaire entre le salarié en retrait et l’employeur, soit pour solliciter l’arbitrage de l’Inspection du travail, et ultimement bien sûr pour éviter que la situation ne se reproduise, en mettant en place de mesures préventives.
CSE et droit d’alerte
Lorsque le CSE constate la présence d’un danger grave et imminent au sein de l’entreprise, potentiellement par un salarié lors de la mise en œuvre d’un droit de retrait, il doit en alerter immédiatement l’employeur. En effet, le CSE dispose d’un droit d’alerte.
Pour plus de renseignements sur le droit d’alerte et la procédure à suivre, n’hésitez pas à consulter notre article : Droit d’alerte cse : exemples, procédure et code du travail.
En complément de notre article dédié, voici une infographie récapitulative de la procédure d’alerte « danger grave et imminent ».
DĂ©finition du droit de retrait
Le droit de retrait est un principe du droit du travail qui permet aux salariés de se retirer d’une situation de travail qui présente un danger grave et immédiat pour sa santé, sa sécurité, ou la santé ou la sécurité de ses collègues. Il peut donc s’agir d’un danger individuel ou collectif.
À noter : Selon la jurisprudence, pour s’exercer collectivement, le droit de retrait (Cass. soc., 22 octobre 2008, n°07-43740) se justifie par le fait que :
- Chaque salarié soit menacé individuellement par un danger grave et imminent.
- Chaque salarié informe individuellement son employeur de l’exercice de son droit de retrait.
Tout salarié qui estime qu’une situation de travail présente un motif raisonnable de se retirer, car il n’a pas la possibilité d’une alternative (utiliser un autre équipement, un autre procédé, etc.) peut exercer son droit de retrait en refusant de faire la tâche qui lui est demandée dans les conditions imposées.
Ainsi, il permet aux salariés de quitter ou de refuser de prendre leur poste de travail, sans avoir besoin de l’autorisation préalable de leur employeur.
Le droit de retrait doit se baser sur une évaluation objective et raisonnable de la situation. Son exercice ne doit pas non plus générer un danger pour d’autres personnes.
À noter : Le devoir d’alerte peut être exercé en même temps que le droit de retrait ou préalablement.
Droit de retrait : que dit la Loi ?
Le droit de retrait dans le Code du travail en France est encadré par l’article L4131-1: « Le travailleur alerte immédiatement l’employeur en cas de danger grave et imminent dont il a connaissance. Il peut se retirer d’une telle situation. L’employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d’une défectuosité du système de protection. » (Source : Légifrance).
À noter : Concernant le droit de retrait, des dispositions supplémentaires peuvent exister dans les conventions collectives ou accords d’entreprise.
Formation Qualité de Vie au Travail (QVT) & Risques psychosociaux (RPS)
Nous vous aidons dans votre rôle de représentant du personnel. Exemples de thématique :
- Rôle du CSE en cas d’accident du travail et de maladie professionnelle
- Que faire lorsque les membres du CSE se sentent démunis ou non écoutés
- Outils à utiliser pour une démarche de prévention
- Comment lutter contre les souffrances au travail
Le droit de retrait fonction publique : spécificités
Bien que sensiblement similaire à celui du droit privé, le droit de retrait enseignant (droit de retrait éducation nationale) ou le droit de retrait infirmier par exemple, répondent à des spécificités et des procédures différentes. Source : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F496
Elles sont définies par le Code de la fonction publique : articles L811-1 à L814-2 et les décrets n°82-453 du 28 mai 1982 et n°85-603 du 10 juin 1985 relatif à l’hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu’à la médecine professionnelle et préventive dans la FPT.
Qui a le droit d’exercer le droit de retrait ?
Tout salarié, qu’il soit en CDD, CDI, contrat d’intérim ou tout autre statut, a le droit d’exercer son droit de retrait, du moment que la perception du danger grave et imminent est justifiée et raisonnable.
Attention : les travailleurs indépendants ne sont pas couverts par le dispositif du droit de retrait. Dans ce cas, ils doivent simplement se retirer de la tâche, et informer le commanditaire. C’est le tribunal qui tranchera en cas de conflit.
Quelle est la procédure à suivre pour exercer le droit de retrait ?
La procédure du droit de retrait
Pour pouvoir exercer son droit de retrait, le salarié doit respecter une procédure spécifique :
- Le travailleur identifie le danger imminent et grave, et l’impossibilité de trouver une alternative sécuritaire pour effectuer son travail.
- Il alerte l’employeur immédiatement de la situation verbalement, par écrit, mail, ou par tout autre moyen. Il peut également en informer le CSE ou toute instance représentative du personnel, qui pourra lui-même exercer son droit d’alerte en parallèle.
- Le salarié cesse l’activité dangereuse et reste à disposition de son employeur pour fournir des informations complémentaires sur le danger qui se présente.
- L’employeur prend les mesures nécessaires pour éliminer le danger grave et imminent.
- En cas de désaccord entre l’employeur et le salarié sur la persistance du danger, l’inspection du travail ou le CSE peuvent être saisis.
- À la résolution du risque ou si le danger s’avère n’être ni grave ni imminent, l’employé reprend son travail.
Droit de retrait et retour au domicile
En pratique, est-il possible pour un salarié qui exerce son droit de retrait de rentrer chez lui ? Non, comme vu dans la procédure, le salarié doit rester à la disposition de son employeur.
Dans l’attente de la prise de mesures nécessaires afin de reprendre son activité, le salarié peut, par exemple, être affecté temporairement à un autre poste (qui correspond à ces compétences). Il retournera alors son poste lorsque l’employeur le lui indiquera.
Combien de temps peut durer un droit de retrait ?
L’exercice du droit de retrait du salarié peut durer jusqu’à ce que l’employeur ait mis en place des mesures de protection adaptées. Celles-ci mettant fin à la situation dangereuse.
Quelles sont les conséquences du droit de retrait ?
Le droit de retrait d'un salarié peut avoir plusieurs conséquences, nous en avons noté 8 :
- C’est un potentiel conflit entre le salarié et son employeur.
- L’évaluation du danger « grave et imminent » peut sembler subjective, aussi le maximum d’arguments doit être apporté.
- Le droit de retrait aura un effet sur la continuité du travail. Un salarié qui se retire peut par exemple interrompre des opérations.
- Le droit de retrait incite les employeurs à être plus vigilants et moins négligents.
- Le droit de retrait permet de prévenir les accidents du travail.
- Le salarié a la possibilité d’assurer sa propre protection et de se protéger d’un environnement de travail jugé dangereux.
- Le salarié qui exerce son droit de retrait est protégé des sanctions (si l’exercice de ce droit est fondé et respecté).
- Le salarié qui exerce son droit de retrait ne doit pas subir de perte de rémunération.
Si les conditions du droit de retrait ne sont pas avérées, alors le salarié peut subir une retenue sur salaire pour son absence.
Exemples et cas concrets d’exercice du droit de retrait
Voici quelques exemples de retrait justifié :
- En période de COVID-19, le salarié était prié de travailler sans masque au contact de clients.
- Le salarié doit conduire un véhicule avec des avaries sur les freins (Cour d’appel Paris, 16 janvier 1992, n°91/34223).
- Le salarié d’une entreprise de toiture doit travailler dans des conditions météorologiques extrêmes de vent, de verglas… Le salarié doit travailler dans un local plein de produits inflammables, sans dispositifs anti-incendie.
- Le salarié doit travailler dans un local plein de produits inflammables, sans dispositifs anti -incendie.
- Le salarié chargé de nettoyer des voitures dans un atelier dont la température était aux environs de 3°C (Cour d’appel de Douai, 20 avril 2012 n°11/01756).
- Le salarié en binôme constate que son collègue conducteur d’engins de chantier est sous l’effet de l’alcool.
- L’employé doit effectuer un remplacement pour un poste dangereux pour lequel il n’a pas reçu la formation de sécurité.
- La constatation d’un défaut de conformité des installations de l’entreprise avec les normes de sécurité (Cass. soc., 1er mars 1995, n°91-43406).
- L’employé doit manipuler des produits chimiques potentiellement dangereux, non étiquetés ou périmés.
- L’employé est confronté à une menace physique d’un client sur son lieu de travail.
- L’employé constate que l’équipement de protection individuelle (ÉPI) est défectueux ou manquant et il devrait monter sur une toiture sans harnais.
- Un chauffeur qui refuse de conduire son autobus, car la suspension est selon lui trop souple et la direction trop dure, alors que le médecin du travail l’a déclaré uniquement apte à la conduite de véhicule dont la direction est souple (Cass. soc., 10 mai 2001, n°00-43437).
- Etc.
Enfin, voici un exemple de retrait injustifié :
- Un salarié qui quitte son poste sans autorisation et s’installe dans un autre bureau au motif que les courants d’air qu’il subit présentent un danger grave et imminent pour sa vie et sa santé (Cass. soc., 17 octobre 1989, n°86-43272).
Nous vous déconseillons de faire de ces exemples des généralités. En effet, chaque affaire portée devant les juges va dépendre de circonstances particulières et uniques. Ces situations ne peuvent pas être forcément transposées telles quelles à votre situation.
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Droit de retrait et température : quels sont les critères ?
La loi ne définit aucun seuil de température au-dessus de ou sous laquelle un employé est autorisé à quitter son poste pour le droit de retrait chaleur ou le droit de retrait froid.
Le Code du travail impose uniquement de chauffer les locaux pendant la saison froide, de fournir des EPI adaptés aux conditions de température très basse et de bien ventiler les locaux.
Un droit de retrait relatif à des températures extrêmes devrait donc étayer la notion de danger immédiat pour la santé ou la sécurité (par exemple, pas d’équipements de protection pour travailler dans une chambre froide ou une fonderie non ventilée).
Droit de retrait et Covid-19 : quelles sont les règles ?
Dans le cadre d’un risque sanitaire, tels qu’une épidémie de Covid-19 ou autre pandémie, l’exercice du droit de retrait n’est pas justifié si l’employeur :
- A mis en place les dispositions légales prévues par le Code du travail et les recommandations nationales sur la protection des salariés.
- A informé et préparé les salariés.
Quelles sont les différences entre le droit de retrait, le droit d’alerte et le droit de grève ?
- Le droit de retrait permet à un travailleur de se retirer d’une situation de travail qu’il considère comme présentant un danger grave et imminent. Il doit prévenir l’employeur, et reprendre le travail dès que le danger a été éliminé.
- Le droit d’alerte permet à un salarié d’informer son employeur de dangers qui peuvent être anticipés, pesant sur les employés ou sur l’entreprise. Le danger n’est pas réel et en cours, mais pourrait se présenter. Le droit d’alerte ne s’accompagne pas d’un arrêt du travail.
- Le droit de grève a pour objectif de défendre des intérêts économiques et sociaux des salariés et s’accompagne de revendications, qui ne sont pas nécessairement liées à la sécurité au travail.
Les procédures pour les trois cas de figure sont différentes.