Confidentialité du CSE : obligation & secret professionnel

L’obligation de discrétion ou de confidentialité des membres du CSE s’impose à eux concernant certaines informations. Cependant, comme tous les membres de l’entreprise, les élus disposent d’un droit d’expression.

  • Comment s’applique cette liberté d’expression lors des réunions avec l’employeur ?
  • Peut-il vous sanctionner pour l’utilisation de ce droit ?
  • Quelles sont les informations concernées par le secret professionnel et l'obligation de discrétion ?

Dans cet article, nous traiterons ce sujet en détail afin de vous permettre de mieux comprendre certains de vos droits et obligations.

Confidentialité du CSE

Qu’est-ce que l’obligation de discrétion ?

Selon l’article L.2315-3 du Code du travail, tous les élus du CSE (titulaires, suppléants et représentants syndicaux) doivent respecter une obligation de discrétion concernant les informations qui présentent un caractère confidentiel et qui sont renseignées comme telles par l’employeur.

Qu’est-ce que le secret professionnel concernant les membres CSE ?

Selon ce même article, les membres du CSE ont l’obligation de respecter le secret professionnel pour toutes les questions relatives aux procédés de fabrication.

Quel est le but de ces obligations ?

Ces obligations ont pour but de protéger l’entreprise contre toute fuite d’informations stratégiques en empêchant les élus de les divulguer aux personnes extérieures au CSE. 

Qui est concerné par ces obligations ?

Dans les entreprises de plus de 50 salariés, le secret professionnel et l’obligation de discrétion concernent, en plus des élus du CSE :

  • Les membres du CSE central ou du comité de groupe.
  • Les experts auxquels le CSE peut recourir (expert-comptable, experts techniques, etc.).
  • Les techniciens ou experts que l’employeur peut associer aux différentes commissions du CSE.
  • Les élus du CSE participant au conseil d’administration ou de surveillance de la société.
  • Les collaborateurs qui assistent l’employeur.
  • Les membres de la CSSCT.
  • Les CSE externalisés chargés de rédiger les PV des réunions.

Quelles sont les informations concernées par l’obligation de discrétion et de secret professionnel ?

Des informations différentes sont concernées par l’obligation de discrétion et de secret professionnel.

L’obligation de secret professionnel

Comme vu précédemment, l’article L.2315-3 du code du travail précise que ce sont toutes les informations concernant les procédés de fabrication qui sont concernés par le secret professionnel. Il peut s'agir d'un savoir-faire, d'une composition chimique ou culinaire, etc…

Cette obligation est automatique, c’est-à-dire que l’employeur n’a pas à le signaler aux élus.

L’obligation de discrétion

L’obligation de discrétion peut concerner plusieurs types d’informations comme :

  • Les projets de nouveaux produits.
  • Les orientations stratégiques.
  • Les études de marché.
  • La réponse à un appel d’offres.
  • Etc.

La seule condition est qu’elle doit présenter un caractère objectivement confidentiel. C'est-à-dire lorsque sa divulgation pourrait nuire aux intérêts de l’entreprise et lorsqu’elle n’est pas connue du personnel ou du grand public. 

Ainsi, un cas de jurisprudence a déjà démontré que l’employeur qui classe, par exemple, confidentiels tous les documents d’un projet sans en justifier la nécessité porte atteinte aux prérogatives du comité.

Lors des réunions, l’employeur doit informer expressément les élus CSE de la confidentialité de l’information au préalable ou au moment de la remise de documents ou de sa présentation. Cette déclaration doit être indiquée dans le procès-verbal de la réunion.

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À noter  : Dans le cas où l’employeur ne présente pas la confidentialité d’une information ou d’un document, il ne pourra pas reprocher à l’élu de l’avoir communiquée.

Cependant, la loi considère que certaines informations sont de fait confidentielles et l’employeur n’est donc pas obligé de le rappeler, il s’agit des :

  • Informations concernant la recherche d’un repreneur en cas de fermeture d’un établissement.
  • Documents de gestion prévisionnelle (compte de résultat et plan de financement prévisionnels) et situation de l’actif réalisable et de passif exigible de la BDESE.
  • Informations communiquées dans le cadre d’un droit d’alerte économique.
  • Informations sur la vie privée des salariés ou des membres de la direction.

Dans le cas de l’obligation de discrétion concernant les informations de la Base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE), l’employeur doit préciser :

  • De quelles informations précises il s’agit.

  • La durée du caractère confidentiel.

En effet, toutes les informations contenues dans la BDESE ne peuvent être confidentielles, car cela empêcherait les élus d’informer les salariés.

Ainsi, les secrétaires de CSE rédigent parfois deux procès-verbaux pour la même réunion, un PV complet qui sera archivé dans les documents du CSE et un PV allégé qui pourra être diffusé.

Si l’employeur abuse de l’obligation de discrétion, il pourra être poursuivi pour délit d’entrave au fonctionnement du CSE, les élus ne pouvant plus informer le personnel de l’entreprise.

Focus sur le CSE et l’accès aux données salariales

D’après un arrêt rendu par la Cour de cassation (Cass. soc., 5-12-18, n°16-26895), les élus du CSE peuvent demander des informations précises et écrites concernant les données salariales de l’entreprise. En effet, le respect de la vie privée des salariés n’étant pas considéré comme un obstacle, car les élus sont tenus à une obligation de confidentialité et que la demande de ces éléments est motivée par un motif légitime et qu’ils sont nécessaires à l’exercice des droits du CSE.

Ici, le juge à ordonné la transmission des :

  • Règles d’attribution des budgets par division et par département.
  • Principes de rémunération en lien avec le cadre fonctionnel et l’évolution salariale dans la fonction avec les modalités d’accès au maximum de la fonction.
  • Règles de détermination du calcul du bonus annuel de performance individuelle.
  • Tableaux de concordance faisant apparaître les bornes de rémunération pour chaque classe et pour chaque fonction et le niveau dans le cadre fonctionnel.
  • Règles d’évolution salariales entre les fonctions et les différents niveaux.
  • Fourchettes de rémunération par fonction.

Il est à noter que l’arrêt n’évoque pas la transmission des données salariales individuelles. Cependant, il est possible que celles-ci puissent être accessibles aux élus s’ils arrivent à démontrer que cette information est nécessaire à l’exercice de leurs fonctions.

Quelles conséquences en cas de violation de ces obligations ?

En fonction de la faute, la violation du secret professionnel ou de l’obligation de discrétion peuvent avoir des conséquences différentes.

La violation du secret professionnel

En cas de violation du secret professionnel, l’élu peut faire l’objet de poursuites pénales pour délit de révélation d’une information à caractère secret. À celles-ci peut s’ajouter un licenciement pour faute grave ou même pour faute lourde si l'intention de nuire à l’entreprise est prouvée.

En effet, l’article L.1227-1 du Code du travail prévoit « le fait pour un directeur ou un salarié de révéler ou de tenter de révéler un secret de fabrication est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 30 000 euros. La juridiction peut également prononcer, à titre de peine complémentaire, pour une durée de cinq ans au plus, l’interdiction des droits civiques, civils et de famille prévue par l’article 131-26 du Code pénal. ».

La violation de l’obligation de discrétion

En cas de violation de l’obligation de discrétion, l’entreprise peut lancer des poursuites en justice contre l’élu afin d’obtenir des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi. De plus, l’employeur peut prononcer une sanction disciplinaire contre l’élu.

L’article 226-13 du Code pénal sanctionne également toute « révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire ». La peine prévue est d’un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

En effet, il peut s’appliquer aux membres du CSE, de par leur mandat (temporaire) et des informations sensibles qui sont portées à leur connaissance dans ce cadre.

Secret professionnel du CSE

Qu’en est-il de la liberté d’expression en réunion CSE ?

Comme tous salariés, les élus (titulaires, suppléants ou représentants syndicaux) bénéficient d’un droit d’expression direct et collectif sur les contenus, les conditions et l’organisation de leur travail (article L.2281-1 du Code du travail).

Ainsi, lors des réunions CSE, l’employeur ne peut pas imposer de limites de paroles sous peine d’être accusé de délit d’entrave.

Cependant, il doit également veiller au bon ordre des débats et à une répartition équitable des temps de paroles afin que tous puissent être entendus librement.

Attention cependant aux écarts de langage. En effet, l’utilisation de propos injurieux à l’encontre de l’employeur permet de justifier une autorisation de licenciement par l’inspection du travail et peut donner lieu à une amende.

Ainsi, selon la jurisprudence (Cass. soc. 27 février 2013, n°11-27474), le comportement injurieux d’un élu (propos outranciers et irrespectueux avec utilisation de jurons) autorise son licenciement.

À noter  : En réunion CSE, la législation sur les diffamations publiques n’est pas applicable, car la salle de réunion n’est pas un lieu public.

En conclusion, en tant qu’élus, vous possédez une grande liberté d’expression. Cependant, celle-ci possède des limites à ne pas franchir notamment dans l’usage que vous en faites et le respect des règles de secret professionnel et de discrétion.

Avis de non responsabilité : Cet article de blog est destiné à des fins d'information uniquement et ne constitue pas des conseils juridiques spécifiques. Les lecteurs doivent discuter de leur situation particulière avec un avocat ou professionnel du droit.

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