Harcèlement sexuel au travail : loi, sanction et exemples

Selon une enquête de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) de 2019, 2 % des hommes et 10 % des femmes se disent avoir été victimes de harcèlement sexuel au travail dans les 12 derniers mois.

Cependant, cette notion reste complexe, car elle peut prendre des formes très diverses. 

  • Quelle est la définition légale du harcèlement sexuel au travail ?
  • Comme reconnaître un cas de harcèlement sexuel ?

Dans ce guide, nous vous donnerons toutes les informations pour vous aider à gérer au mieux cette situation s’il vous arrivait de la rencontrer et de nombreux exemples de harcèlement sexuel au travail.

Cas de harcèlement sexuel

Qu’est-ce que le harcèlement sexuel au travail ?

Le harcèlement sexuel est défini, dans l’article 222-33 du Code du pénal et dans les articles L.1153-1 et suivants du Code du travail, comme le fait d’imposer à une personne des propos ou des comportements à connotation sexuelle ou sexiste, de manière répétée qui :

  • Provoquent une situation intimidante, offensante ou hostile.

  • Portent atteinte à sa dignité de par leur caractère humiliant et/ou dégradant. 

Il peut également s’agir de propos ou comportements imposés à une personne de façon successive, par plusieurs personnes sans concertation, mais qui connaissent la situation et qui savent que ceux-ci caractérisent une répétition (cas du cyber-harcèlement par exemple).

Ou encore, lorsque les propos ou comportements sont imposés par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’initiative de l’une d'entre elles, et ceux même s’il ne s’agit pas d’actes répétés par la même personne.

Enfin, est aussi associé à du harcèlement sexuel le fait de faire fortement pression sur un travailleur dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, même sans répétition.

  • Il n’est pas nécessaire qu’il y ait une relation hiérarchique entre la victime et l’auteur des faits. Il peut s’agir, par exemple, de harcèlement entre 2 salariés de même niveau hiérarchique ou encore entre un subordonné envers son employeur.

  • Le harcèlement sexuel n’est pas uniquement exercé par les hommes sur les femmes. Il peut s’agir par exemple d’actes de femmes sur des hommes ou encore entre 2 personnes de même sexe.

Quelle est la différence entre harcèlement sexuel et agression sexuelle ?

La différence entre harcèlement sexuel et agression sexuelle est que dans ce dernier cas, l’auteur des faits a eu un contact physique avec sa victime, celui-ci ayant eu lieu avec violence, contrainte, menace ou surprise. Ce fait est plus gravement puni par la loi, en effet la peine encourue est de 5 ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amende (10 ans et 150 000 € en cas de circonstances aggravantes).

Il peut s’agir par exemple du fait de bloquer une salariée contre un mur pour lui toucher les fesses.

différence entre harcèlement sexuel et agression sexuelle

Comment reconnaître un cas de harcèlement sexuel ? 

Exemples de pression grave dans le but d’obtenir un acte de nature sexuel

Ce type de harcèlement sexuel se présente généralement comme :

  • Un abus d’autorité s'exerçant au travers de menaces sur les conditions de travail. 
  • Par des actes de chantage au licenciement, à l’embauche, à l’augmentation, à la mutation ou à la promotion.

Pour être reconnu comme harcèlement sexuel, il n’est pas nécessaire dans ce cas qu’il y ait une répétition. Devant la gravité des faits, un acte isolé suffit.

De plus, il n’est pas obligatoire que l’auteur des faits ait véritablement eu l’intention d’obtenir un acte sexuel (agissements par jeu, pour pousser à la démission ou dans un but d’humiliation, etc.).

Exemple de faits constituant un harcèlement sexuel au travail

CA Toulouse 18 janvier 2002, n°01/1140 : Adresser à un subordonné des remarques sur sa vie privée, porter des jugements axés sur son anatomie, essayer d’obtenir des faveurs sexuelles et mettre en œuvre des mesures de représailles professionnelles.

CA Douai 31 janvier 2007, n°06/00150 : Demander à un salarié des rapports sexuels en échange d’une augmentation de salaire, même si les faits ont eu lieu lors d’une soirée.

Exemples de comportements ou propos à connotation sexuelle non désirés et répétés

Pour ces faits, comme vus précédemment, la répétition est primordiale. Cependant, la loi n’indique pas de nombre de fois minimum. Deux fois est donc déjà une répétition. De plus, pour les prendre en compte, il n’y a ni délai minimal ou maximal entre les agissements.

Une autre condition est le non-consentement de la victime. Celui-ci, selon la loi, n’a pas à être exprimé de façon expresse et explicite. Ainsi, il peut se traduire par une demande d’intervention à un supérieur hiérarchique ou à des collègues. Il peut également s’agir d’un silence permanent face à ses agissements.

Exemples d’autres faits caractérisant un harcèlement sexuel au travail

Cass. Soc. 28 janvier 2014, n°12-20497 : Faire parvenir à un employé plusieurs longs courriers et mails contenant des propositions et déclarations déplacées, d’exprimer le souhait d’une rencontre seule dans un bureau et de lui faire parvenir des bouquets de fleurs.

Cass. Soc. 12 février 2014, n°12-26652 : Envoyer plusieurs SMS à un subordonné à caractère personnel en lui indiquant notamment ­­« je te souhaite une douce journée avec plein de baisers sur tes lèvres de velours ».

Cass. Soc. 19 octobre 2011, n°09-72672 : Tenir des propos à caractère sexuel ou envoyer des messages électroniques pendant l’heure du déjeuner et lors de soirées d’entreprises.

Cass. Soc. 3 mars 2009, n°07-44082 : La tentative d’obtenir des faveurs de nature sexuelle de la part d’un salarié en offrant des cadeaux, en l’appelant de nombreuses fois, en allant à son domicile et en faisant intrusion dans sa vie privée dans le but de la persuader et même de la contraindre à céder à ses avances.

CA Douai 19 décembre 2008, n°08/00986 : Avoir un comportement injurieux (insultes, remarques à caractère sexuel, gestes déplacés, etc.).

Exemples de propos ou comportements caractérisant un harcèlement sexuel au travail

  • Propos, plaisanteries grivoises ou obscènes.
  • Mise en évidence de textes, vidéos, images, objets à caractère pornographique ou sexuel.
  • Propos familiers à connotation sexuelle ou sexiste.
  • Sifflements, regards insistants.
  • Actes sexuels mimés, jeux de langues.
  • Remarques sur le physique ou la tenue portée.
  • Contacts physiques non désirés (accolades, main sur l’épaule, etc.).
  • Cadeaux gênants et nombreux malgré de nombreux refus.
  • Propos ou questions d’ordre intime ou sur les pratiques sexuelles.
  • Nombreuses propositions de sorties malgré plusieurs refus.

La définition du harcèlement sexuel au travail

Que faire en cas de harcèlement sexuel ?

A qui s’adresser en cas de harcèlement ?

La première chose à faire en cas de harcèlement sexuel est de sortir du silence. En effet, ne rien dire peut avoir des effets néfastes sur la santé. 

Pour cela, le salarié a le choix entre plusieurs interlocuteurs. Ceux-ci ont pour rôle de le soutenir et de l'accompagner dans cette épreuve. De plus, ils pourront l'aider dans ses démarches s'il souhaite engager des poursuites contre l’auteur des faits ou l'employeur.

Ces interlocuteurs privilégiés sont :

Exemple de modèle de courrier de signalement de faits de harcèlement sexuel à adresser à l’employeur (source : travail-emploi.gouv.fr).

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Dans la fonction publique

Il existe un dispositif de signalement des actes de violence, de discrimination, de harcèlement sexuel ou moral et des agissements sexistes. Il permet la mise en place de dispositifs appropriés pour le recueil des signalements et l’orientation des agents victimes ou témoins.

Il permet de garantir la confidentialité des informations transmises par la victime ou le témoin lors de la procédure.

Le défenseur des droits

En cas de harcèlement sexuel, il est possible de saisir le Défenseur des droits.

En effet, celui-ci peut :

  • Enquêter.

  • Faire des recommandations.

  • Procéder à un règlement amiable ou à une transaction civile ou pénale.

  • Présenter ses observations devant les juridictions saisies.

Procédure suite au signalement d’une situation de harcèlement dans l’entreprise

Une fois le signalement de harcèlement fait, l’employeur doit prendre toutes les dispositions pour le faire cesser rapidement.

Pour ce faire, la procédure type suivante (recommandée, mais non obligatoire) peut être suivie :

  • Accuser réception du signalement.
  • Rencontrer pour un premier échange l’auteur du signalement.
  • Procéder à une première analyse des faits (la situation n’est pas constitutive de harcèlement sexuel ou il existe une possibilité que ce soit le cas).
  • Réaliser une enquête s’il y a un doute de harcèlement.
  • Élaborer le rapport d’enquête et le communiquer.
  • En cas d’identification d’un cas de harcèlement, il est possible de sanctionner l’auteur des faits ;  il faut aussi accompagner la victime au sein de l’entreprise.
  • En cas de conclusion d’absence de harcèlement, il faut protéger le salarié à l’origine du signalement (absence de sanction sauf en cas de mauvaise foi avérée) et l’accompagner dans sa poursuite des relations de travail.

La réalisation d’une enquête n’est pas obligatoire pour l’employeur dès lors que le signalement n’a pas été effectué par un élu CSE (voir paragraphe ci-dessous). Cependant, il est fortement conseillé à l’employeur de la mener notamment en cas de poursuite ultérieure.

Cas particulier du signalement de harcèlement sexuel par un membre du CSE

Dans le cas où le salarié s’est confié à un élu du CSE (qu’il soit référent ou non), la procédure qui va en découler, au sein de l’entreprise, comporte des particularités.

En effet, ici ce sera la procédure spécifique au droit d’alerte qui va s'appliquer (articles L.2312-5 et L.2312-59 du Code du travail) 

De fait, l’employeur sera saisi par un élu CSE d’une atteinte aux droits d’un salarié concernant des faits de harcèlement sexuel. Il devra donc procéder sans délai à une enquête obligatoire avec le membre de la délégation du personnel et mener toutes les actions nécessaires pour faire cesser cette situation.

Dans le cas où il y aurait carence de l’employeur ou désaccord sur la réalité de l’atteinte et que de fait aucune solution n’est trouvée avec l’employeur, le salarié ou l’élu CSE peuvent saisir le conseil de prud’hommes.

Dès lors, le juge pourra ordonner toutes mesures nécessaires afin de faire cesser cette atteinte et assortir sa décision d’une astreinte.

reconnaître un cas de harcèlement sexuel

Quels sont les recours de la victime de harcèlement sexuel ?

La victime de harcèlement sexuel dispose de deux principaux types de recours : le recours contre l’auteur des faits et contre l’employeur.

Les recours contre l’auteur des faits

Il est possible en tant que victime de porter plainte devant la justice pénale contre le ou les auteurs présumés.

La plainte peut être déposée dans un délai de 6 ans après le dernier fait de harcèlement.

Pour cela, il faut s’adresser à la gendarmerie ou au commissariat de votre choix. Suite à cette démarche, la plainte est transmise au procureur de la République.

Pour ces démarches, l'assistance d’un avocat n’est pas obligatoire, mais conseillée.

À noter  : 

  • Dans le cas où la plainte est classée sans suite, mais que vous souhaitez poursuivre la procédure, vous pouvez déposer une plainte avec constitution de partie civile.
  • Dans une entreprise, il est possible pour une organisation syndicale représentative d’engager l’action en justice à la place de la personne harcelée, avec son accord écrit.

Les recours contre l’employeur

Selon l’article L.1153-5 du Code du travail, l’employeur doit mener toutes les actions nécessaires afin de prévenir, mettre un terme et sanctionner le harcèlement sexuel au travail. S’il n’a pas respecté cette obligation légale de prévention, alors il est possible de le poursuivre en justice afin d’obtenir une indemnisation.

Cette procédure peut être engagée en même temps que le dépôt de plainte à l’égard de l’auteur présumé du harcèlement sexuel. Pour cela, il faut saisir :

  • Le tribunal administratif dans le cadre de la fonction publique. 
  • Le conseil de prud’hommes dans le cadre du secteur privé.

Il faut bien comprendre que le recours contre l’employeur et celui contre l’auteur des faits peuvent viser des personnes bien distinctes.

Par exemple, il est possible de poursuivre un manager, auteur des faits de harcèlement, au pénal et en parallèle, l’employeur de l’entreprise, aux prud’hommes pour indemnisation.

Un employeur peut voir sa responsabilité engagée lorsque le harcèlement est le fait d’une personne extérieure à l’entreprise si cette personne est en mesure d’exercer une autorité de fait ou de droit sur les salariés. Il peut s’agir par exemple d’un fournisseur ou d’un prestataire (Cass. soc. 1er mars 2011, n°09-69.616).

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Nous vous aidons dans votre rôle de Référent Harcèlement . Exemple de thématique :  

  • Réagir à un signalement de harcèlement
  • Les formes de harcèlement moral et sexuel
  • La responsabilité de l’employeur et risques

Comment prévenir le risque de harcèlement sexuel ?

Comme vu précédemment, la prévention du harcèlement sexuel est une obligation légale de l’employeur. Celle-ci se traduit de plusieurs manières.

Les obligations spécifiques en matière de prévention du harcèlement sexuel

Plusieurs obligations spécifiques s’appliquent sur cette thématique : 

  • Désigner un référent harcèlement sexuel et agissements sexistes dans les entreprises de plus de 250 salariés.
  • Informer les salariés, candidats et stagiaires sur le harcèlement sexuel.
  • Élaborer une procédure interne de signalement et de traitement des faits de harcèlement sexuel.
  • Faire apparaître dans le règlement intérieur les dispositions du Code du travail relatives aux agissements sexistes et au harcèlement sexuel.

Exemple d'affichage obligatoire relatif au harcèlement sexuel

Il est obligatoire de mettre en place un affichage relatif à la prévention du harcèlement sexuel dans les lieux de travail ainsi que sur les portes ou dans les espaces dédiés aux processus d'embauche.

Cet affichage informe sur les sanctions qui peuvent être appliquées, les recours civils et pénaux disponibles en cas de harcèlement sexuel, ainsi que les coordonnées des autorités et des services compétents.

TÉLÉCHARGER UN EXEMPLE D'AFFICHAGE OBLIGATOIRE SUR LE HARCELEMENT SEXUEL EN PDF

Ces obligations spécifiques ne suffisent pas à écarter la responsabilité de l’employeur en cas de harcèlement sexuel. En effet, il doit également, selon l’article L.4121-1 du Code du travail, « prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ».

Les actions de prévention au titre de l'obligation générale en matière de santé et sécurité

Il est important de ne pas oublier des mesures plus globales de prévention qui s’avèrent elles aussi très efficaces. D’autant plus qu’en cas de litige, cet aspect sera pris en compte par les juges.

En effet, la question se posera de savoir si les mesures de prévention mises en œuvre sont bien proportionnées aux risques qu’ils représentent dans l’entreprise.

Pour cela, plusieurs solutions existent :

  • L'évaluation des risques de harcèlement sexuel et d’agissements sexistes dans le Document unique d’évaluation des risques.
  • La mise en place d’actions de prévention (sensibilisation des salariés, formation des membres du CSE et du référent CSE en matière de lutte contre le harcèlement et les agissements sexistes, formation du personnel encadrant).
  • L’inclusion de cette thématique dans la négociation obligatoire sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail.

Quelles sanctions juridiques en cas de harcèlement sexuel au travail ?

Selon l’article 222-33 du Code pénal, le harcèlement sexuel est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 € d'amende. 

Cette peine peut être portée à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d'amende lorsque les faits sont commis :

  • Sur un mineur de moins de 15 ans.
  • Par une personne ayant autorité sur sa victime de par ses fonctions.
  • Sur une personne vulnérable (âge, maladie, situation économique ou sociale, grossesse).
  • Par une personne ayant autorité de droit ou de fait.
  • Par un groupe de personnes agissant en tant que complice ou auteur.

À noter  : L’auteur des faits peut également être condamné à verser des dommages-intérêts à la victime. 

De plus, dans le secteur privé ou public, il est passible de sanctions disciplinaires.

En conclusion, le harcèlement sexuel au travail est encore de nos jours trop fréquent. En effet, les harceleurs profitent encore trop de la méconnaissance des victimes sur les lois qui les protègent. Cet article est destiné à vous renseigner au mieux, en tant qu’élu, pour vous donner les moyens de protéger au mieux les salariés. 

Pour plus de précisions et de détails, le gouvernement a élaboré un guide pratique et juridique sur le harcèlement sexuel et les agissements sexistes que vous pouvez consulter.

Avis de non responsabilité : Cet article de blog est destiné à des fins d'information uniquement et ne constitue pas des conseils juridiques spécifiques. Les lecteurs doivent discuter de leur situation particulière avec un avocat ou professionnel du droit.

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